Ce programme de recherche s’intéresse au vaste éventail de nouveaux produits, éléments ou composants du second œuvre ayant permis de matérialiser et de qualifier l’architecture des Trente Glorieuses (1945-1975). 

Rarement estimés à leur juste valeur, souvent relégués au statut de matériel de seconde zone, les composants qui équipent, recouvrent, protègent et qualifient les constructions récentes relèveraient, pour certains, d’un savoir-faire mineur, appartenant au registre de la décoration, tout juste bon à éveiller quelques souvenirs nostalgiques convoqués dans les décors des séries TV. Pourtant, le développement de l’industrie d’après-guerre a révolutionné une pratique du second œuvre qui s’est démultipliée, accélérée par les exigences de bien-être croissant et l’attention extrême portée à la qualité du cadre de vie. En témoignent les pages des revues spécialisées d’architecture qui, durant cette période à l’économie florissante, regorgent de nouveaux produits, reflets de la diversité des catalogues rassemblés dans les agences d’architecture, rompues à un nouvel art de la prescription.

À l’heure d’une crise écologique planétaire sans précédent qui impose des changements sociétaux impérieux, il serait bon d’apprendre à regarder, comprendre, expertiser les réalisations d’un passé récent trop souvent rejeté par ignorance. Et si le refus de l’amnésie était le point de départ d’une nouvelle manière de penser le projet d’architecture, en prenant la peine d’aller fouiller l’infra-ordinaire sans chambouler l’existant, en choyant un héritage infiniment plus riche qu’il n’y paraît ?

C’est cette ambition qui porte le programme de recherches Les produits de la croissance, développé depuis 2020 par Eric Monin et Catherine Blain au sein des unités de recherche LATCH (ensap de Lille) et IPRAUS/AUSser (ensa de Paris-Belleville).

Prenant assise sur les travaux menés depuis plus de dix ans au sein du séminaire de Master Archéologie du projet de l’ensap de Lille (sous la  direction d’Eric Monin), valorisé dans le cadre d’une exposition présentée à Lille puis à Paris aux printemps 2022 et 2023, ce programme a l’ambition de rassembler des compétences autour de savoirs innovants, d’expertises historiographiques et opérationnelles permettant de répondre à des problématiques encore très marginales dans le domaine de la protection et de la conservation du patrimoine contemporain. Par la constitution de cette plateforme collaborative, il invite également, dans le fil des débats et expérimentations contemporaines sur le réemploi, à explorer la délicate et vertueuse problématique du soin de choses.